Refrain déjà entendu par ici (et que l’on espère répéter le plus fréquemment possible) : les plus belles rencontres sont souvent les plus inattendues. Le dernier exemple en date pourrait se résumer ainsi : aller à un concert de The Big Pink en traînant un peu les pieds, considérer avec peu d’enthousiasme la performance bof bof des Soft Crayon avant de s’alarmer devant la mise en place scénique d’un deuxième groupe, non indiquée sur le ticket et s’inquiéter: « A quelle heure je vais devoir prendre mon train? ». Mais lorsque le duo sur scène a fini d’installer son matériel et débute son set, on oublie rapidement toutes ces appréhensions. On remarque d’abord avec plaisir les gimmicks hip hop irrésistiblement dansants et ludiques avant d’encaisser tout en douceur le choc de la voix si particulière du chanteur, tantôt profonde, tantôt aérienne, mélodieuse et un instant irréelle parce que imprévue, en opposition avec les conventions musicales des beats électroniques qui l’entourent. Ce soir, dans la salle du Point Ephémère, il suffit de tourner la tête pour remarquer plusieurs signes qui indiquent le caractère rare du moment : le soudain silence du public, les nez qui se lèvent, les regards qui se fixent sur la scène, les sourires qui se dessinent sur les lèvres, l’adhésion instantanée. Le chanteur, grand échalas, casquette vissée sur le caillou et chemise à carreaux se remue maladroitement sur scène, sample sa voix, joue quelques accords à la guitare tandis que son collègue, bonnet enfoncé jusqu’aux oreilles et penché sur son ordinateur, balance les tempos et les sons. Entre rythmes funky, éléctro minimaliste, douceur folk de la voix et formatage pop, le mélange pourrait ressembler à une immonde bouillie putassière ; c’est une alchimie toute en délicatesse et harmonies.
Voici donc Isaac Delusion, le projet musical de L. et J. et signé chez Craki, petit label parisien qui en abritant le jeune duo a sans doute dégoté une petite merveille. Sorti au mois de janvier, le EP Midnight Sun permet une première introduction à l’univers du groupe avec le titre éponyme en ouverture suivi par un délicieux et dansant « Waiting ». En comparaison, les deux derniers morceaux, « Iron Man » et la version acoustique de « Waiting », semblent un peu plus en dedans, dépouillés et classiques. Mais aucune inquiétude à avoir quant à l’inspiration des Isaac Delusion. A l’écoute des concerts du duo, le répertoire est déjà bien fourni, rempli de petits joyaux aux couleurs doucement chatoyantes et tamisées. Le meilleur est à venir pour Isaac Delusion et on l’attend avec impatience.
Grand consommateur de Baby Carottes et de sorbets au yuzu, j’assume fièrement mon ultra dépendance au doux-amer, à l’électropop bancale et chétive, aux musiciens petits bras ainsi qu’aux formes épurées du grand Steve Ditko. A part cela? Il y avait péno sur Nilmar.
Nad Richard
Petite merveille de musique, grands poètes délicieux qui ne cessent de m’enchanter.
[DARK GLOBE]
[…] vraiment encore nécessaire de présenter les Isaac Delusion, eux qui ont déjà eu les honneurs d’un article dans notre humble webzine, et surtout, avec pas moins de quatre extraits live pour autant de […]