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Live Reports

Warhaus (première partie de Ghinzu)/ Arles, Théâtre Antique/ 17 juillet 2024

A rebours…Il en est des premières parties comme les préliminaires à toutes choses, l’attente, la préparation, plus intenses que la programmatique, plus charnelles que la chair, plus incarnées que le geste, plus confortables que la réflexion, plus sensuelles car plus naturelles.

C’est, à mes yeux, à mes yeux seulement, ce qui fut, ce soir-là, à l’occasion du concert de Warhaus en la ville sise sur le Rhône. Warhaus, en première partie de Ghinzu donc, à rebours des attentes du public majoritairement venu assister aux bondissantes et métalliques incantations post-punk du groupe bruxellois auteur en 2004 du très marquant et sonore Blow, opus qui ce soir se devait d’être célébré d’ailleurs.

Maarten Devoldere est venu donc avec son combo quintet ultra-orchestré nous présenter -enfin- au sud- l’épaisseur moite, complexe et mélodique de sa production musicale. Il est venu contre le vent du midi qui attendait les bourrasques de Ghinzu nous présenter le zéphyr velours de sa patte musicale.

Marteen est un homme bicéphale, il lui pousse une tête du côté de Balthazar le remarquable groupe dont il est l’essentiel second membre, les LP’s Sand et Fever, ont récemment marqué les esprit soyeux et les regards attentifs à autre chose, à une nouvelle proposition musicale. Le bicéphale donc engendre avec Warhaus un second organisme musical autour de sa propre personne, un solo accompagné dont les opus sont – eux-aussi – gouleyants et ambrés comme une bière flamande, le tout dernier Ha Ha Heartbreak en 2022 nous a – à nouveau – arrimés à son bateau ivre mélodique mélancolique.

Ce soir de juillet dans l’alcôve romaine du théâtre antique ( Escales de Cargo de Nuit) où s’étaient réunis ceux qui ne l’attendaient pas, j’ai ouvert grand les yeux car grande était mon attente de le voir sur scène et grande fut sa proposition artistique. Warhaus c’est tout d’abord une posture, une stature bref une allure, une élégance légèrement datée, volontairement à rebours du paysage musical actuel. Il faut se hâter lentement semble t-il témoigner sans vraiment le dire. Micro en mains, il lui faut chalouper avant de lancer la voix, chalouper avant de happer la note et l’imparable mélodie qui saisit à coup sûr. Warhaus, c’est un climat, une atmosphère, surannée, enveloppante, profonde. C’est du cinéma panoramique, oui sa musique est en cinémascope…même en ouverture.

Sur scène, il alterne les instruments, joue avec l’éclairage, comme au cinéma, fait hurler trompette et trombone, comme au cinéma, la voix est d’un bois solide et assuré, capable d’instaurer des climats et des climax de mélodies bouleversantes, comme Ennio au cinéma.

Sur l’écran des références, les volutes des fumerolles scéniques nous laissent imaginer Tom Waits, Serge Gainsbourg ou Léonard Cohen. Pour autant sa proposition est la représentante d’un monde à rebours des modes de l’urgence et des tonalités chahutées, des saccades ultra rythmées, du monde hystérique du BPM ( Business Process Management ndlr) . Oui, certes, le set fut court, trop court pour que Marteen et son quintet ne puissent réellement installer ce climat mélodique et mélancolique dont la grammaire de lenteur a besoin de temps pour être lue avec détail mais il a pu lever le voile sur l’ampleur de son talent de grand fauve flamand. Cela l’espace d’une introduction à l’envers de la soirée annoncée par Ghinzu qui tiendra promesse dans la saccade bruyante. A contresens et à rebours donc, j’ai enfin vu l’alchimie belge de Marteen Devoldere transformer les préliminaires en opération à cœur ouvert.

Photo mise en avant par Rocknfool . Autres photos DarkGlobe.fr

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