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C’était un peu le concert qu’on attendait, depuis les fêtes de fin d’année et leurs incommensurables excès de bouffe et d’alcool, la vague de froid, la tempête de neige qui a presque immobilisé le pays ; le festival hivernal du Sonic, et surtout, cette première date, proposée en coprod par le Sonic et Bigoût Records : la collaboration des noiseux suisses de Ventura et le chanteur crieur déjanté de The Jesus Lizard et Qui, David Yow. Rien que sur l’affiche, l’alliance de la voix de ce dernier et de l’habit musical que lui proposent les premiers a déjà quelque chose d’alléchant.
Mauvaise nouvelle pourtant quand on arrive, on apprend que si tout le monde est arrivé dans les temps (et ces périodes froides et neigeuses, les retards inopportuns ne sont pas inhabituels) el señor Yow est sous antibiotique, qu’il dort (on se demande un peu où, mais qu’importe) et qu’il ne faut pas s’attendre à une prestation des plus physiques ce soir.
Le temps de laisser envoler quelques espoirs donc, c’est Otarie Club qui ouvre le bal, posé à même le sol entre la scène du sonic et le public qui s’est agglutiné en masse devant le trio (je crois), nous reléguant moi et ma bière au quatrième ou cinquième rang, et m’empêchant d’étrenner mon nouvel appareil photo (offert par le père Noël, qui m’a dit texto en avoir ras le bol de mes vidéos pourries shootées au téléphone portable. Maintenant vous aurez des vidéos pourries shootées au Panasonic Lumix). Otarie Club donc, jeune formation composée de plusieurs musiciens venant d’autres groupes çà et là – comme je le pensais et comme le confirme ici un collègue (Haz, il va bien falloir qu’on s’attèle à l’arbre généalogique des groupes locaux, moi je commence à y perdre mon latin là). Dès les premières notes c’est une basse épaisse, grasse et vrombissante qui nous remplit le globe occipital, précédant de peu une guitare elle aussi poussée aux amphets par un bon frigo placé derrière (on en revient toujours à ces basses considérations freudiennes mais les gros amplis, quand même, ça fait un autre effet). Je distingue ce que je peux mais je suis assez proche pour voir que le batteur est obligé de taper bien fort pour se mettre au niveau sonore de ses contemporains, et que si les trois musiciens en appellent encore au regard pour synchroniser leurs breaks et changements de tempo, tout cela est plutôt carré et fait preuve d’une mise en place intéressante dans la composition des morceaux, le groupe jouant sur les structures et passant sans complexe de plans ultra répétitifs à des motifs plus mélodiques, tout en restant dans le bien plombé – on est pas chez Alice au Pays des Merveilles non plus, faut pas déconner.
Un peu plus tard, lorsque le trio plus un de tête d’affiche monte sur scène, c’est en effet un David Yow à la mine rabougrie qui se découvre, et les premiers morceaux confirment nos craintes : malgré une volonté bien évidente, et leur application à la tâche, les trois musiciens – et demi – peinent à faire monter la mayonnaise. Je n’ai jamais vu The Jesus Lizard en concert mais à en croire un afficionado à coté de moi Yow chante beaucoup mieux sous l’effet de l’alcool que sous celui des cachetons. C’est quand même une bonne chose que le concert n’ait pas été annulé (d’autres l’auraient fait sans vergogne pour moins que çà) mais on ne peut pas s’empêcher de penser à la claque qu’on aurait pu se prendre avec un Mr Yow en pleine forme – et passablement bourré. Là, on se contente du minimum syndical – qui n’a pour autant rien de déplaisant.
Le hurleur finit par laisser Ventura jouer quelques morceaux seuls, qui seront ma foi presque plus intéressants à écouter, sans doute la cohésion de l’ensemble, plus palpable – et l’expédition des trois ou quatre titres des plus directes réinjectant un peu de rythme à un set qui commençait à en manquer. Yow revient enfin pour quelques titres supplémentaires, dont la video un peu plus haut (excellent morceau qui est par ailleurs une reprise de Big Black), et pour l’ahurissant final « It’s Raining » qui lui, mettra tout le monde d’accord (on peut en voir une vidéo ici, merci marieXXme de Noise Mag). Avec un peu plus de temps pour travailler ensemble, l’union Yow-Ventura aurait sans doute pu nous sortir un disque – et un set – complet de cet accabit. Frustration, quand tu nous tiens.
Un peu décevant à coté de ce qu’il aurait pu être, donc, on est quand même bien content d’avoir vu David Yow sur scène – et surtout d’avoir pu découvrir Ventura, parce que ces trois Suisses sont à l’évidence bourrés de talent. A suivre avec attention…
cultive ici son addiction à la musique (dans un spectre assez vaste allant de la noise au post-hardcore, en passant par l’ambient, la cold-wave, l’indie pop et les musiques expérimentales et improvisées) ainsi qu’au web et aux nouvelles technologies, également intéressé par le cinéma et la photographie (on ne peut pas tout faire). Guitariste & shoegazer à ses heures perdues (ou ce qu’il en reste).