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Disques

Selebrities / Lovely Things

Selebrities_lovely_Things_aAvant toute chose, je me dois de reconnaitre mon erreur. Malgré ce que j’ai pu écrire dans mon précédent article à leur sujet, la pochette de Lovely Things, le nouvel album de Selebrities ne présente pas Maria Usbeck, la ravissante chanteuse du groupe, au beau milieu d’une séance de brossage de dents. Et c’est bien dommage parce qu’à la place, c’est l’ensemble du groupe en mode portraits en superpositions quadricéphale (enfin, si j’ai bien compté) qui s’offre la place d’honneur de l’album. Si tout cela reste toujours un peu étrange, pas spécialement vilain mais heureusement un peu monstrueux, c’est tout de suite moins sexy. Car de par ici, nous considérons Selebrities comme le maillot jaune (c’est de saison) brooklynien d’un revival new wave tendance électronique relevé par une grosse louche de sensualité, incarnée bien entendu par la jolie voix de Maria, aguichante sans être vulgaire.

Et ce n’est pas Lovely Things qui va nous faire changer d’avis sur la question: voix en apesanteur en mode déclinaisons de soupirs amoureux ( les « woo ahaha » de « Found »), lignes de basses cold wave accrocheuses et mélodiques, guitares lumineuses, synthétiseurs aériens, batteries martiales, mélodies souvent faussement relâchées (le single « Temporary Touch ») et enjôleuses comme autant de jeunes filles à l’allure sage cachant des idées bien moins farouches (« You made me feel the rush… you made me feel the dirt again »), de bouffées de chaleurs précédant un réveil crapuleux. L’ensemble respire bon une esthétique des années 80 ancrée solidement dans le bon goût (ce qui peut paraître parfois particulièrement compliqué avec cette décennie). On retrouve dans Lovely Things ce qu’il y a de toujours charmant chez Selebrities, cette capacité à manier le second degré, que ce soit dans leur esthétique ou leur propos, à déclamer de manière presque joyeuse sur la fuite amoureuse de « Born Killers » qu’il s’agit de  “the greatest mistake of our lives!”. Mais remarquablement, c’est lorsque le ton devient plus sérieux, se rapproche d’une humeur sombre, que le groupe marque les esprits : que ce soit sur le très nerveux et presque désespéré aux accents Cure-sque « Lovers », la prostration dépouillée de « You’re Gone » titre dont la fragilité est tenue par la voix de Maria ou encore un cafardeux et désabusé « Whither Away ». Car même si Lovely Things respire, d’une manière ou d’une autre, la luxure, le résultat final se dessine au-delà de cette extase, de cette petite mort pour se concentrer sur les noeuds à l’estomac qui s’en suivent. Du plaisir partagé ne reste bientôt plus qu’un goût amer dans la bouche, une odeur de transpiration flottant entre les draps jusqu’à la terrible révélation de la solitude définitive et immanente de l’être humain (“But now the only truth I know is we’re alone ‘til we die” sur « Forged To Be Broken »). Un aveu qui n’empêche pas l’album de finir sur une note d’optimisme, un extatique « I Could Change » très New Order des débuts, comme une conclusion nécessaire pour célébrer ces moments éphémères de bonheur et proposer une fuite en avant.

Par rapport à son premier album, Delusions, Selebrities a gommé ses aspérités sonores pour se concentrer avec un talent certain sur l’écriture de morceaux electro pop élégants, soniquement droits dans leurs bottes et dans lesquels l’euphorie le dispute au désenchantement. Un équilibre semble avoir été trouvé dans lequel l’identité musicale du groupe, plus ambigüe qu’il n’y paraît de prime abord, se dessine peu à peu. Il manque encore ce supplément d’âme, cette agressivité suffisamment excitante pour que notre enthousiasme soit total. Néanmoins, les fondations sont là, solides, et l’engouement suffisamment présent pour nourrir notre curiosité à leur égard et que nous restions à l’affût de leur prochaine étape musicale.

 

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