Après 11 années d’existence, Oceansize fait partie de ces groupes qu’on aime ou qu’on déteste, mais le plus souvent dont on ignore l’existence… Ce n’est certainement pas cet EP atypique dans leur discographie qui va les sortir de l’ombre, et pourtant, enregistrement après enregistrement, le quintet de Manchester s’emploie à faire toujours mieux et à fournir un travail riche et personnel.
Présenter et résumer Oceansize à ceux qui ne connaissent pas est une tâche difficile, mais on peut dire que dans cette formation on retrouve 3 guitaristes qui ont appris à ne faire qu’un, un bassiste puissant, un batteur qui figure tout simplement parmi les plus inventifs qu’il soit, et des harmonies vocales riches, remplies d’amour dégoulinant. Ces cinq hommes travaillent depuis leur premier album une musique unique en puisant dans leurs influences 90’s d’adolescents les mêlant à des sonorités bien plus métalliques, sans oublier au passage de voler le meilleur de ce que le post-rock a eu a offrir pour au final l’appliquer à leurs compositions asymétriques. Oceansize impressionne pour plusieurs raisons. Tout d’abord parce qu’après un premier album impressionnant et frais, ils sortent un EP surpuissant, suivi par un second album regorgeant de pièces meilleures que sur le premier opus, avant de nous offrir un troisième album largement au-dessus de tout ça. Ensuite, le travail fourni par le groupe transpire dans chaque note, chaque son, chaque arrangement, d’une manière particulièrement saisissante. Troisième point, Oceansize réussit là où la quasi-totalité des groupes actuels qui se disent « prog » (Oceansize s’en défend) échouent, à savoir composer une musique complexe qui ne l’est pas à écouter, débarrassée des clichés d’un genre sur la corde raide. Enfin, les prestations lives du groupe sont à chaque fois des moments intenses dont la maîtrise force le respect. Oceansize a fait le choix depuis longtemps de se concentrer sur sa musique plutôt que sur sa carrière, et ça leur réussit plutôt bien jusque là…
Venons-en à Home & Minor, dernière sortie en date du quintet. Cet EP d’une trentaine de minutes (6 titres dont 2 instrumentaux) a été enregistré par le groupe dans son studio flambant neuf puis mixé par Chris Sheldon, collaborateur fidèle. L’objectif avoué de ce mini-album était de présenter une face plus soft de leur travail de composition, abordant la thématique du regard qu’on porte sur son adolescence à l’âge adulte, de ce qu’on conserve de cette période, notamment différentes sortes de peur. Un regard en arrière qui permet ici au groupe d’enregistrer pour la première fois un disque sans distortion ni riff sauvage, se rapprochant d’influences avouées par Mike Vennart à savoir Talk Talk (période Spirit of Eden et Laughing Stock) ou les canadiens de Broken Social Scene et Do Make Say Think, influences qui s’étaient déjà faites sentir sur « Red Rag To A Bear », inédit diffusé par le groupe via son forum.
Une des forces et qualités de cet enregistrement est la diversité des titres et le fait qu’aucun ne soit réellement meilleur qu’un autre: aucun ne se ressemble, mais tous s’assemblent pour former un tout cohérent. Home & Minor délivre des drones magiques, du piano qui vit, souffle et grince, des caisses claires caressées, des arpèges oniriques, des tapis volants, des notes fantômes et résiduelles, du lapsteel, quelques légères pointes d’électronique en renfort et tout un tas de bizarreries délicates dans la production. Les guitares se font plus chaleureuses, plus en relief que par le passé. Les voix sont, comme toujours, savamment orchestrées par Mike Vennart, chanteur talentueux qui en irrite plus d’un. Sa manière d’utiliser le chant dans le champ musical auquel appartient Oceansize est particulièrement classe et intelligente, la voix étant réellement insérée comme un instrument à part entière, dépassant le simple cadre de l’illustration narrative. Mark Heron, à la batterie, même dans un contexte aussi calme, arrive à faire preuve d’une grande inventivité à travers son jeu d’ (illegal) alien africain du futur. Les cuivres font également leur apparition dans l’orchestration, et le résultat est plus que probant (Do Make Say Think encore…). Avec Home & Minor, Oceansize continue de rendre la complexité évidente et nécessaire à travers ces morceaux légers, mesurés, contenus.
Loin de tout ce qu’ils ont fait par le passé et pourtant en parfaite cohérence avec leur travail.
ps: A noter qu’est sorti simultanément Feed to Feed, un coffret 3 dvd + 4 cd retraçant les 3 concerts du 10è anniversaire du groupe lors desquels ils ont exécutés la quasi-intégralité de leur discographie…
Pour tous ceux qui préfèrent le côté le plus saignant du groupe, il faudra patienter jusqu’au prochain album dont certains titres joués lors de la dernière tournée promettent d’être plus écorchés que par le passé… Et vous pouvez aussi vous pencher sur le cas de Kong, trio dirtynoisypunky de Manchester comprenant la section rythmique d’Oceansize, qui a sorti son (très bon) premier album cette année.
En écoute : « Getting Where Water Cannot »
[audio:https://darkglobe.free.fr/extraits/091206.mp3]
Haz
Max, j’ai changé d’avis, tu démontres déjà que tu es bien plus prolifique que ton collègue : fais toi donc payer !
Lionel
Qu’est ce que tu crois Haz, je choisis pas mes associés n’importe comment !