Poursuivant la réédition « définitive » de ses albums, New Order a sorti fin novembre le coffret de son quatrième opus Brotherhood, publié le 29 septembre 1986 sous la référence FAC150 au catalogue du label Factory.
La couleur métallisée du coffret rappelle celle de la pochette du disque, qui représente une feuille d’alliage zinc-titane. Ce matériau est connu pour être particulièrement malléable, très résistant à l’usure mécanique et au temps : ne sont-ce pas là les vertus de l’amitié et, en l’occurrence, de la fraternité ?
Il est dit que ce visuel avait été choisi par Peter Saville en référence à son intérêt d’alors pour les travaux de l’artiste Yves Klein, mais on en mesure toute l’ironie si l’on fait un lien avec le titre de l’album, dont la structure musicale même préfigure la scission du groupe : les guitares dominent la première face du vinyle, les synthétiseurs prennent le pas sur la seconde, dans une sorte de « schizophrénie » (pour reprendre le terme de Stephen Morris) entre post-punk et synth-pop.
La composition et l’enregistrement du disque ne furent guère « fraternels », le bassiste Peter Hook œuvrant le jour, tandis que le reste du groupe travaillait la nuit et ne se privait pas de défaire le travail de leur comparse, non sans un malin plaisir de la part du chanteur-guitariste Bernard Sumner, qui était allé jusqu’à tenter de réduire systématiquement le volume de la basse de Hooky au moyen d’un potar sur la console de mixage… stratagème déjoué par l’ingé-son Mike Johnson qui, à l’insu de Sumner, avait désactivé la fonction dudit potar !
L’album, remasterisé comme les précédents par Frank Arkwright (Abbey Road Studios), nous est livré en version vinyle replica 180 g et en CD avec son habituel titre bonus (« State Of The Nation »).
Il est accompagné d’un second CD de raretés choisies par le batteur Stephen Morris, Andrew Robinson (manager de New Order avec Rebecca Boulton depuis 1999) et le compositeur James Zeiter. On y trouve 9 démos enregistrées en 1985 au Japon, dont une version de « Angel Dust », sous le titre « Evil Dust » aux surprenants accents orientaux, nettement plus prononcés que dans l’album.
Notons aussi les versions « longue durée » inédites des morceaux « Every Little Counts » et « Skullcrusher » (instrumental « joydivisionesque » composé pour la B.O. du film Salvation!, mais qui n’y figurait qu’en version courte ; les 4 autres titres de cette B.O. sont aussi dans ce CD, à savoir : « Salvation Theme », « Sputnik », et les 2 versions spéciales de « Touched By The Hand Of God » et « Let’s Go »).
Le coffret comporte 2 DVD, contenant diverses apparitions télévisées et des prestations live, dont 2 concerts quasi entiers : Brixton Academy, Londres, 1987 (il manque « Touched By The Hand Of God ») et GMEX, Manchester, 1986 (avec la participation, sur « Ceremony », de Ian McCulloch, chanteur de Echo & The Bunnymen).
Le concert de Londres ressort plutôt bien (malgré les crachouillis dans « Age Of Consent »), tandis que l’enregistrement de l’autre concert fait plus amateur. Le reste se laisse regarder, bien que de qualité inégale (sur le DVD 2, bonne captation de « Sister Ray », mais les extraits du concert du Pier 84 à New York relèvent de la mauvaise chaîne personnelle sur Youtube…) ; séquence nostalgie aussi pour les Français qui retrouveront leurs regrettés Enfants du Rock avec « Paradise » et « Bizarre Love Triangle » (émission Rockline, 1987).
Le tout est bien entendu complété d’un livre de belle facture ; on n’y apprend pas grand chose mais on appréciera toujours les photos d’Anton Corbijn et quelques curiosités dans la catégorie memorabilia (dont un superbe presse-papier « True Faith »).
Les plus fortunés pourront opter pour un coffret complété d’un T-shirt et 3 vinyles 12″ des singles de « Bizarre Love Triangle », « State Of The Nation » et « Touched By The Hand Of God ».
Encore un truc pour complétiste, dira-t-on. Oui. Et vivement la suite ! Le prochain coffret serait probablement celui de Technique, qui a certes fait décrocher certains fans – la tendance de la face B de Brotherhood l’ayant emporté dans l’évolution de New Order – mais en a recruté bien d’autres.
Mon nom est « Personne », en portugais « Pessoa », tel le Lispoète « immobilis in mobili ». Telle devrait être la devise du Nautilus, puisque pour voyager, « il suffit de fermer les yeux » (L. F. Céline). Et ouvrir les oreilles, ce que je fis de prime jeunesse avec les paternels 45 t. des Shadows, suivis du déclic-klang Kraftwerk en 1978, puis vint 1983 : découverte de Joy Division, Marc Seberg… Puissé-je de temps en temps refaire surface ici et vous ouvrir mon carnet de bord.