« Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois ». Je ne sais pas pourquoi je pense à ce proverbe qui n’a somme toute pas grand chose à voir avec notre chronique du jour (encore que), peut-être rapport à ce petit quelque chose que Kerretta a de plus que nombre de ses formations instrumentales contemporaines. Ce genre de groupe se met à proliférer mais il faut bien s’avouer que ce n’est pas souvent pour le meilleur. Kerretta est donc un trio originaire d’Auckland, en Nouvelle Zélande, pas très loin de Napier – d’où vient une autre formation qu’on avait découvert en première partie de la dernière tournée européenne d’Isis, et qu’on apprécie beaucoup par ici, j’ai nommé Jakob.
Si le trio d’Auckland joue sur des partitions assez différentes (encore que Jakob n’aurait sûrement pas renié les nappes progressives et éthérées de « Dinshah »), ils n’ont pas oublié eux non plus ce que « groove » et « énergie » signifient: en attestent les deux titres d’ouverture, « Sleepers » et l’ultratubesque « Maven Fade ». S’il fallait rapprocher le groupe d’un des « maîtres du genre » on tendrait plutôt vers un Russian Circles, mais il serait dommage de se limiter au jeu des comparaisons tant les néozélandais font ici preuve d’initiative. On ne peut pas proprement parler de révolution pour autant – n’exagérons rien – mais la batterie est diablement efficace (une frappe sèche et précise comme on aime en entendre), les parties de six cordes sont intelligentes, la basse est ronde et généreusement dispensée; les mouvements s’enchaînent rapidement, la machine est bien huilée; pas le temps de s’ennuyer. Le groupe se révéle autant à l’aise dans les parties au tempo ralenti que lorsque la machine s’emballe. Qui plus est – est ça n’est pas le moins important – Keretta a su densifier son propos, gonfler sa musique pour lui donner un corps puissant et imposant – ce avec une seule guitare, peu d’overdubs semble t’il – et peu d’effets, même si on distingue çà et là quelques mesures samplées (encore une fois subtilement placées). L’ensemble du disque bénéficie d’un son incroyablement précis et incisif; ce n’est pas pour rien que la délicate tâche du mastering a ici été confiée à un certain Bob Weston (Shellac).
Remarquons-le, c’est le label Golden Antenna (Maserati, Daturah) qui a la bonne idée d’importer cette jeune formation sur notre vieux continent. Espérons que son succès y sera suffisamment marqué pour voir Keretta tourner par chez nous dans un futur proche… J’en salive déjà.
En écoute : « Maven Fade »
[audio:http://www.goldenantenna.com/wp-content/uploads/2010/03/02-Maven-Fade.mp3]cultive ici son addiction à la musique (dans un spectre assez vaste allant de la noise au post-hardcore, en passant par l’ambient, la cold-wave, l’indie pop et les musiques expérimentales et improvisées) ainsi qu’au web et aux nouvelles technologies, également intéressé par le cinéma et la photographie (on ne peut pas tout faire). Guitariste & shoegazer à ses heures perdues (ou ce qu’il en reste).
[DARK GLOBE]
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