Sortir des articles en retard (ou ne pas en publier du tout pendant une longue période) fait tristement et malheureusement partie de l’ADN de Dark Globe. Mais force est de reconnaître que cette fois-ci, nous avons totalement explosé nos limites. Car ami lecteur, aujourd’hui, plus d’un an après, nous avons désormais le courage de te l’avouer : nous avions bel et bien interviewé Mike, le compositeur et guitariste des Just Handshakes, juste après un concert à l’International (merci encore à l’association Another Sunny Night). Durant ces quelques trente minutes, le groupe avait éclipsé les têtes d’affiches de la soirée, en l’occurrence les papys Popguns. Ce soir là, ce sont les Just Handshakes qui nous avaient donc collé au mur avec leurs rafraichissantes mélodies pop et évidentes parcourues par des lignes de claviers en zigzags et la voix sucrée-noyée de sa chanteuse Clara, portées par une instrumentation bruyante mais propre pour un rendu brut plutôt surprenant en comparaison de l’atmosphère délicate de leur séduisant album pop publié en (déjà) 2013 : Say It. Depuis ce concert, le groupe est pourtant tristement aux abonnés absents, et double moment de nostalgie parisienne, dans un instant de clarté, nous nous souvenons que c’est en face de l’International, dans un petit café diffusant de la musique nord-africaine à fond les ballons et devant un bol de cacahuètes, que nous avions réalisé l’interview. Ce sont toujours plein de petits détails qui remplissent les plus jolis souvenirs.
Je crois que le groupe se connaît depuis l’Université.
Depuis plus longtemps que cela en fait. Clara, Jim, le batteur et moi, nous nous sommes rencontrés à l’école de musique et c’est à cette époque que nous avons recruté notre premier bassiste. Après trois ans à répéter, nous avons décidé de passer aux choses sérieuses. Malheureusement, notre bassiste est parti tout de suite après avoir l’enregistré l’album. Nous sommes restés en bons termes mais il voulait essayer quelque chose de différent. Nous avons pris l’habitude d’expliquer qu’il avait pris la mer parce qu’il adore naviguer (rires). Nous l’avons remplacé voici environ un an avec un nouveau bassiste.
« Alors que nous étions considérés à nos débuts comme un groupe twee, nous nous sommes démarqués sans même le vouloir de ces références pour une approche plus sombre. »
Vous sortez un EP chez Elefant Records en 2008. Comment se fait-il qu’il vous ait fallu plus de cinq ans pour sortir un nouvel album?
J’imagine en partie à cause de la paresse (rires). Mais aussi parce que nous étudiions différentes choses dans différentes universités. Même en étant basé sur Leeds, j’ai étudié à Manchester. Le bassiste était à Leeds mais Jim vivait près de York. Donc nous étions assez éparpillés et ne pouvions nous rencontrer qu’une fois par semaine, évidemment le weekend, pour jouer les morceaux, enregistrer et nous relaxer…
Comment garde-t-on un groupe ensemble lorsque l’on reste éparpillés pendant aussi longtemps?
Clara et moi sommes en couple depuis un bon moment donc lorsque je rentrais, c’était d’abord pour la voir mais aussi pour jouer avec le groupe. Je t’avoue qu’étudier la musique m’offrait aussi pas mal de temps libre. Au lieu d’écrire des mémoires ou de mettre en place des projets, je pouvais profiter de certains moments de liberté pour travailler sur tout ce qui avait trait au groupe. J’avais pas mal de temps libre et puis Manchester se situe à peine à une heure de Leeds.
Votre musique a un côté fin des années 80, début des années 90, mais vous êtes trop jeunes pour avoir connu cela.
Cela peut paraître plutôt étrange mais lorsque nous avons commencé, nous n’avions aucune référence musicale indie-pop à laquelle nous accrocher. Nous avons commencé par faire ce qui nous passait par la tête. Au fil du temps, évidemment, nous avons découvert tous ces groupes que nous adorons comme les Cocteau Twins. Et puis nous avons beaucoup progressé. Alors que nous étions considérés à nos débuts comme un groupe twee nous nous sommes démarqués sans même le vouloir de ces références pour une approche plus sombre. Mais c’est quelque chose qui s’est déroulé de manière naturelle à la fois à cause du processus d’écriture et de la musique que nous écoutions.
« Cela peut paraître plutôt étrange mais lorsque nous avons commencé, nous n’avions aucune référence musicale indie-pop à laquelle nous accrocher. »
Cela te dérange que l’on considère ta musique comme twee?
Pas vraiment et d’autant plus que j’ai l’impression que la signification n’est ici pas la même qu’en Angleterre. Là-bas, twee se rapprocherait peut-être de la J-pop tandis qu’ici, c’est bien plus large.
Comment vous répartissez-vous le travail d’écriture?
Claire et moi écrivons les chansons ensemble en commençant par les lignes de guitare, la mélodie, quelques cordes simples et nous développons à partir de cela.
Les claviers offrent une sonorité tout à fait particulière à votre musique
Tout à fait. Clara est obsédée par les vieux synthétiseurs. D’ailleurs, elle adore ce groupe français appelé Melody’s Echo Chamber.
Le rendu en concert est bien plus bruyant que l’album.
Et encore, tu n’as rien entendu! Normalement, nous jouons beaucoup plus fort mais ce soir l’ingénieur du son de la salle nous a expliqué que c’était illégal de dépasser un certain niveau sonore en France. C’est un équilibre difficile à trouver car la voix de Clara est très délicate.
Vous avez supprimé une partie du nom de groupe. Auparavant vous vous appeliez Just Handshakes [We’re British] et désormais c’est Just Handshakes.
C’est une longue histoire. A une époque, il y avait beaucoup de groupes punk qui mettaient une partie de leur nom entre crochets. Cela nous paraissait être un pied de nez marrant dans la mesure où pas mal de gens nous considéraient comme twee et cela nous permettait de ne pas trop nous prendre au sérieux. Mais certaines personnes et d’autres musiciens nous ont expliqué que nous ne sonnions pas comme ils l’attendaient. Qui plus est, le nom prenait une place non négligeable sur les posters et les tickets de concerts (rires) ! De toutes manières, nous avions pris l’habitude de nous appeler entre nous Just Handshakes parce que les crochets représentaient plutôt une pensée que le nom véritable du groupe.
Votre nom de groupe est tout de même le moins racoleur au monde…
(Rires) Originellement, cela vient d’un film intitulé « No Sex Please, We’re British « . J’imagine qu’à l’époque nous étions dans une phase titres de vieux films.
Comment s’est déroulé l’enregistrement de l’album?
Nous l’avons enregistré dans un studio local. Nous avions des tarifs préférentiels lorsque le studio n’était pas réservé. Il y a donc deux parties sur l’album: nous avons d’abord enregistré pendant deux semaines puis pendant trois mois, tandis que le studio était occupé, nous avons finalisé les chansons qui n’étaient pas vraiment prêtes et beaucoup expérimenté au niveau du son. Puis nous avons terminé avec deux autres semaines d’enregistrement.
« Leeds a une très bonne scène musicale mais c’est une ville claustrophobique. (…) Il y a beaucoup de chouettes endroits où jouer mais qui sont souvent accaparés par les groupes plus importants. La scène locale souffre de cette situation. »
J’aime beaucoup votre Remix de « London Bound ».
C’est Jim Hare, un membre d’un ancien groupe de Leeds appelé Milk White White Teeth qui l’a fait. Il s’est aussi occupé de remixer notre deuxième single, « Kiwi » mais celui-ci se trouve sur la version japonaise de notre album.
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Qui s’est occupé des vidéos de « London Bound » et « Kiwi« ?
Elles sont toutes les deux filmées en Super 8 par Martha, une réalisatrice dont le pseudonyme est Cherry Kino. Elle est très talentueuse. Elle baigne les pellicules dans différents types d’émulsion, dessine dessus pour créer des effets différents.
Est-ce que c’est facile de faire de la musique à Leeds?
Leeds a une très bonne scène musicale. Mais quelque part, c’est une ville claustrophobique, plutôt petite. Il y a beaucoup de chouettes endroits où jouer mais qui sont souvent accaparés par les promoteurs et les groupes plus importantes. Et donc la scène locale souffre parfois de cette situation. Il n’y a d’ailleurs pas tant de groupes d’indie-pop que cela sur Leeds; peut-être This Many Boyfriends qui sont bien plus twee que nous.
Le label espagnol Elefant Records a distribué votre EP mais pas votre album.
C’est l’ingénieur qui a enregistré notre EP qui nous a mis en contact avec Luis, le patron d’Elefant Records. Mais il était trop occupé pour s’occuper de l’album et nous avions déjà un deal avec Rallye Records au Japon et Bleeding Gold Records aux Etats-Unis. Roger Preston de Bleeding Golding Gold records est au moins aussi passionné et obsédé que Mike Schulman de Slumberland Records. Souvent, les patrons de label ont tendance à chercher le meilleur prix pour fabriquer les vinyles. Avec lui, c’est tout le contraire, il préfère les beaux objets, il est du genre à te proposer trois couleurs différentes pour ton album. C’est génial de travailler avec lui.
Quels sont vos projets dans le futur proche?
Nous sommes en train d’essayer de voir ce que nous pouvons faire. Notre agent aimerait que nous fassions une plus longue tournée. Nous ne savons pas pour le moment. Nous avons joué quelques nouveaux morceaux ce soir et nous aimerions prendre du temps pour les enregistrer. Mais nous nous déciderons une fois de retour sur Leeds.
Mais tu as l’impression que les choses deviennent enfin plus sérieuses pour le groupe?
Oui mais nous devrions faire les choses de manière plus rapide et ne plus laisser autant de temps passer (sourire).
Photos: orimyo
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Grand consommateur de Baby Carottes et de sorbets au yuzu, j’assume fièrement mon ultra dépendance au doux-amer, à l’électropop bancale et chétive, aux musiciens petits bras ainsi qu’aux formes épurées du grand Steve Ditko. A part cela? Il y avait péno sur Nilmar.