C’est au Cepac-Silo de Marseille, implanté dans le quartier de la Joliette, que le pape du punk Iggy Pop a donné rendez-vous à ses ouailles en ce mardi soir brûlant, par la chaleur du soleil et par l’excitation de voir une légende en chair et en os.
Dans cette jolie salle aux allures de théâtre, l’ambiance est quasi religieuse et empreint d’une émotion palpable. Tout le monde est venu voir « une dernière fois » Iggy Pop. Du haut de ses 75 ans et même s’il ne l’a pas annoncé lui-même, toute semble indiquer qu’il ne quittera plus trop sa retraite floridienne et sa luxueuse villa de Miami pour haranguer les foules européennes dans les années à venir.
Du coup, la fine fleur de la scène marseillaise et des alentours a fait le déplacement. J’ai rarement croisé autant de visages connus pour un concert d’une telle envergure. Ils sont mélangés aux fans de la première heure et à des minots qui, vu leur jeune âge, n’ont probablement pas eu le temps de se plonger dans l’intégralité de la discographie pléthorique du Sieur Osterberg. Le public est bigarré. Quoi de plus normal pour aller contempler un iguane ?
Comme de coutume, les lumières s’assombrissent, les musiciens font leur apparition et une vidéo en noir et blanc qui reprend des images de la tournée de 1981 – probablement issues du DVD Live At San Francisco puisqu’on y voit Iggy porter béret et porte jarretelle, chauffe un public déjà impatient.
L’idole fait son entrée par le fond de la scène, torse nu sous sa veste de costard et portant un collier en argent autour du cou. Ceux qui s’attendaient à voir un vieillard boitillant font la grimace ! L’Iguane est en forme et il compte bien le faire savoir à toute l’Europe, à commencer par Marseille ce soir !
Derrière le groupe qui l’accompagne, d’apparence jazzy, avec ses chœurs et ses cuivres, se cache en fait un redoutable groupe de rock, autant à l’aise avec les titres calmes de son dernier album, Free, sorti en 2019, qu’avec les brûlots punks des Stooges. Mais Iggy est un malin. Il a su piocher dans son répertoire pour en extraire les chansons qui s’adaptent le mieux à l’ambiance qu’il recherche. Si les « I Wanna Be Your Dog », « Lust For Life », « The Passenger », « Sister Midnight » ou autre « T.V. Eye » lui permettent de se mettre dans la poche un public déjà acquis à sa cause, il choisit aussi de faire passer des titres plus méconnus comme ce « Five Foot One » d’anthologie qui ouvre le concert ou encore un « Endless Sea » dont les fans les plus hardcore avaient eux-mêmes oublié l’existence. Ces deux titres, extraits de l’album New Values sorti en 1979 et produit par James Williamson, guitariste de Raw Power, font un lien évident avec tous ses succès les plus connus.
Les puristes, nombreux dans la salle, auront apprécié sa reprise de « Hero » du groupe allemand de Krautrock, Neu !, son interprétation de « I’m Sick Of You », rescapée des séances d’enregistrement de ce qu’aurait dû être le successeur de « Raw Power » et enfin ce « Run Like A Villain » extrait de son album maudit de 1982, Zombie Birdhouse, dont certains auront peut-être eu du mal à se souvenir.
Après 1h30 de show pendant lequel son corps ne l’aura pas trahi, Iggy Pop salue une dernière fois son public qu’il laisse K.O. debout au son de « Search & Destroy » avant de filer derrière le rideau…non sans avoir montré son postérieur au premier rang de la fosse ! Tout le public est resté un moment sans bouger, presque hébété, en ayant l’espoir qu’il revienne pour un dernier rappel. Mais il fallait bien se rendre à l’évidence et retourner dans le monde réel. L’Iguane venait de nous donner une leçon de rock’n roll dont on allait avoir du mal à se remettre !
Amateur et pratiquant de musiques rythmées et de tout ce qui va vite. A ainsi sévi sur ampli Orange et Strat comme sur vélo de course à trois plateaux en côtes et descentes. Rêve de Formule 1 (pas l’hôtel) sur la Riviera. L’adolescent qui sommeille toujours en lui relit souvent des vieux Rock & Folk.