Voilà quelques jours qu’on a reçu très officiellement ce disque (ainsi que quelques autres ouvrages) de Fragment., projet mono-nucléique du Lyonnais Thierry Arnal – pourtant je l’écoute depuis déjà plusieurs semaines. Il s’agit de sa dernière sortie en date, sur le label japonais Happy Prince (outre un split avec Methadrone sorti chez Locust Swarm en milieu d’année dernière et dont on parlera un peu plus tard) présentant un artwork des plus réussis. Quid du contenu?
Long format de huit titres pour plus d’une heure de musique, Is Your Truth Carved In The Sand? n’est pas un album à proprement parler mais une compilation de titres remasterisés extraits des nombreuses galettes (deux LPs et quatre EPs) de Fragment. publiées au cours des quatre dernières années. Le choix des titres semblant avoir été influencé dans un souci de cohérence plutôt que par la force intrinsèque de chacun des morceaux (l’écoute des autres disques et l’intérêt qu’ils suscitent étant largement justifié), il se révèle être une excellente entrée en matière dans l’univers drone/ambiant/shoegaze du monsieur. Le projet repose sur un réel savoir faire dans la mixture de couleurs sonores opposées, quasi-antagonistes entre murs de guitares, vrombissements distordus, nappes cristallines et arpèges délicates, livrant leurs atmosphères, planantes et apaisantes à souhait.
Disons le tout de même, la première chose – et la seule à vrai dire – qui peut démanger à l’écoute de Fragment., c’est cette filiation évidente avec Jesu, tout a fait avouée par ailleurs – et qui après évocation avec Thierry s’avère bien davantage le fruit d’une admiration sincère vouée à l’oeuvre de Justin Broadrick qu’une tentative de plagiat intentionnelle (qui serait pour le cas bien maladroitement dissimulée). Une fois cet obstacle franchi, les compositions de Fragment. peuvent enfin livrer leur essence : le travail sonore effectué ici se montre d’une grande finesse, tant dans l’interprétation que dans le mixage (assuré par Thierry également). On l’apprécie alors d’autant plus lorsque les textures s’éloignent des influences maîtresses et que Fragment. s’autorise un peu de hors-piste, se laissant aller à des envolées plus ambiant à l’image d’un Eluvium ou d’un Mwvm, comme sur « Loose Yourself », et lorsques d’intéressantes expérimentations vocales viennent alors prendre leur place au premier rang (« Burn ») ; ou bien, lorsque les sonorités se noient et s’entrelacent plus volontiers les unes dans les autres, comme les nappes de e-bow ou de claviers, tempérées au rythme des percussions synthétiques.
La musique de Fragment. est une bien belle découverte, et bien qu’une incarnation scénique du projet ne semble pas vraiment d’actualité (dommage, mais à l’heure des voeux il n’est peut être pas désespéré de voir cela changer en 2010?) j’engage personnellement les amateurs du genre à se pencher dessus.
En écoute : « Two Becomes One »
[audio:https://darkglobe.free.fr/extraits/100107.mp3]cultive ici son addiction à la musique (dans un spectre assez vaste allant de la noise au post-hardcore, en passant par l’ambient, la cold-wave, l’indie pop et les musiques expérimentales et improvisées) ainsi qu’au web et aux nouvelles technologies, également intéressé par le cinéma et la photographie (on ne peut pas tout faire). Guitariste & shoegazer à ses heures perdues (ou ce qu’il en reste).