Jeudi 20 mars, Chloé Mons se livrait à un exercice de lecture musicale de son dernier livre Spacing, accompagnée à la guitare par Yan Péchin, l’indéfectible et fidèle enlumineur de mots. Sous le regard de Pierre Terrasson, photographe de légende de la scène pop-rock internationale depuis les années 1980, auteur d’une foultitude de clichés mythiques, également, ce soir, responsable de la photo utilisée pour l’affiche.
Un RDV qui s’est tenu en petit comité entre les rayonnages de la Librairie Parallèles, haut lieu de la contre-culture, nichée dans le quartier des Halles à Paris. Ouverte en 1972, Parallèles est une librairie alternative engagée, typée rock’n’roll, où l’on peut trouver des livres en tous genres, de la littérature politique, des revues littéraires et musicales pointues, des ouvrages musicaux, des bandes dessinées, des disques d’occasion, mais aussi des disques indés ou autoproduits neufs. Un endroit où je passe régulièrement depuis 40 ans pour fouiller sa librairie musicale… et ses fanzines (moins nombreux que jadis, développement des webzines oblige). Une nouvelle génération de vendeurs a relayé celle de mes premiers passages, toujours aussi compétents, sympas et passionnés. pour une librairie symbolisée par un dessin de Franck Margerin reproduit sur les sacs de l’enseigne depuis les années 80.
Régulièrement, l’endroit propose des showcases ou des séances de dédicaces. Début mars, Parallèles a ainsi accueilli le plus corse des rockers Belges, Tony Marlow, accompagné de Dinah Douïeb, pour la dédicace du livre « Wanna be your Skydog », hommage à Marc Zermati, fondateur en 1972 du label indépendant Skydog ( Dogs, Bijou, The Flamin’ Groovies, New York Dolls, Johnny Thunders, Iggy Pop & the Stooges…)
Et début avril, ce sera au tour de Bertrand Pavlik, membre de la rédaction de Dark Globe, de venir dédicacer son dernier essai baptisé « Punk Altitude – Petit traité de spiritualité destroy ».
Parallèles, Bertrand Pavlik, Tony Marlow, Chloé Mons… comme un petit dénominateur commun, une connexion punk et anticonformiste !
Mais revenons à l’hôte de cette soirée du 20 mars, Chloé Mons, épouse d’Alain Bashung. Issue d’une famille d’artistes (son frère cadet, Barnabé est le leader du groupe lillois de rock psychédélique Sheetah & Les Weissmullers), ex mannequin, égérie dans ses jeunes années du photographe Tom Sewell, Chloé est une artiste polymorphe, actrice de cinéma, comédienne de théâtre, écrivaine, autrice-compositrice, musicienne, chanteuse.
Photo © Tom Sewell
Chloé a un univers touchant, fait de voyages et de rencontres, parfois amoureuses, parfois platoniques, parfois physiques et impudiques. Une femme libre et entière, sincère, tantôt réservée, tantôt libertine.
Spacing est son troisième livre, par lequel elle nous entraîne dans le journal de sa vie, sur sa planète, rêveuse immobile ou globe-trotteuse. Evidemment, les douze années de vie commune avec Alain Bashung y tiennent une place importante et apportent une forte dose d’émotion. Elle y dévoile des photos intimes et par petites touches ses mémoires d’instants de vie (avec Alain ou pas) et de rencontres… Notamment celle avec Jean-Louis Murat, avec l’attraction magnétique exercée par le regretté poète Auvergnat jusqu’à l’enregistrement de leur duo « 3 minutes » en 2018 pour l’album Hôtel de l’Univers .
Une demi-heure de lecture, habillée d’accords de guitare, des passages choisis entrecoupés de quelques chansons de son répertoire et une reprise de « Happe », sommet d’émotion écrit par Bashung et le parolier Jean Fauque . La soirée est chaleureuse, tout en simplicité, comme toujours avec Chloé Mons et Yan Péchin, frère et sœur de musique, très accessibles l’un et l’autre.
Photo par Pierre Terrasson
La première fois que j’ai vu Chloé en concert en solo, c’était en 2007, au Zèbre de Belleville. Elle venait de sortir La Ballade de Calamity Jane, d’après le recueil des lettres qu’aurait écrites à sa fille l’héroïne du Far West, mère célibataire, aventurière et féministe. Dans la salle du plus petit cabaret d’Europe, un bar et une poignée de tables rondes de bistrot. A l’une d’entre elles, on pouvait voir le chanteur Christophe, venu en ami. Sur scène , comme ce soir, aux côtés de Chloé, évidemment Yan Péchin avec le génial harmoniciste Diabolo.
Huit albums ont suivi ,expérimentaux et rock’n’roll, avec des artistes -et pas les moins « barrés »- parmi lesquels : Blixa Bargeld (ex guitariste des Bad Seed de Nick Cave, fondateur des Einstürtzende Neubauten) pour l’album Alectrona en 2016, Chris Eckman ( leader des Walkabouts) pour Hôtel de l’Univers en 2018 ou encore Xavier Boussiron, artiste punk, peintre, compositeur et musicien pour l’album Il Buyo en 2012.
Des albums aux créations originales émaillés de relectures très inspirées de classiques, emmenés par Chloé dans son univers, avec langueur et sensualité. C’est encore celui-ci qui est offert ce 20 mars. On y entre ou pas, la curiosité est nécessaire.
Car Chloé Mons évolue hors des sentiers battus dans sa création, mais aussi dans ses concerts, joués dans des formats atypiques (piano-voix, guitare-voix, avec percussions, avec cordes, avec cuivres). Dans l’espace de la librairie on mêlera ainsi lecture et musique . Chloé aime les endroits insolites, : un cabaret, un hangar, un salon de musique, une maison de plaisirs, une église, un atelier, une jonque, une ancienne ferme, un théâtre à l’italienne, un cinéma, un disquaire, une librairie donc… Ces lieux sont souvent des mouchoirs de poche .
Femme de passions, l’artiste vit ses envies à fond, en mode « Fly me to the moon », à la fois forte, indépendante, écorchée et fragile comme dans la chanson popularisée par Franck Sinatra et Peggy Lee qu’elle reprend en conclusion de cette lecture. « Punk et roots » selon la formule trouvée par un journaliste de Longueur d’Ondes
Captation vidéo, Librairie Parallèle, par Pierre Musy.
Chloé Mons? Une artiste à part, inclassable et follement attachante !
https://www.facebook.com/chloe.mons?locale=fr_FR
Photo mise en avant, Chloé Mons, par Parisbazaar
J’ai grandi à l’aire des dauphines, jeune scélérat sans roi. Adolescent, une voix à la radio m’a soufflé « Je fume pour oublier… » et a éveillé ma curiosité musicale jusqu’à l’envie. Balayés le disco et ses paillettes, le noir était de mise et resterait ma livrée. Toujours pas dynamité d’aqueduc, à peine dressé quelques loulous… J’aime la musique qui ose et les voix qui en imposent. Et que ne durent…