Me voilà donc à l’heure (pour une fois) à mon rendez vous annuel avec les nuits de Fourvière. Arcade Fire en 2007, Massive Attack en 2008, et cette année, c’est Blur qui s’y colle. C’est drôle, je me souviens de la gueguerre pathétique qui opposait Blur et Oasis au milieu des nineties. A l’époque, ça ressemblait plutôt à une suite de faits divers à propos de laquelle la presse anglaise (sa réputation n’est plus à faire dans ce domaine) prenait un malin plaisir à jeter de l’huile sur le feu, et s’en donnait à cœur joie en relatant les prises de bec entre Damon Albarn et les frères Gallagher (quand ces deux derniers n’étaient pas occupés à se taper sur la gueule l’un de l’autre). De mon coté, j’avais choisi mon camp, optant pour sans hésitation pour la légereté et le coté fun des chansons de Blur (« Girls & Boys » m’a toujours donné la patate) et laissant aux autres la pop ennuyeuse des Mancuniens – et accessoirement l’attitude écoeurante de Liam Gallagher dont j’avais bien accidentellement été témoin au Paléo Festival de Nyon en juillet 2000 (j’ai beau avoir essayé aussi fort que je le pouvais, arriver à faire la part des choses entre le talent potentiel d’un artiste et le fait qu’il soit un connard fini n’a jamais été mon fort). La suite m’a de toute façon bien conforté dans ce choix, avec l’album 13 qui m’a assez marqué (alors qu’Oasis sortait son ignoble Standing On The Shoulder Of Giants) et quelques tubes que je me plais encore à écouter aujourd’hui. Certes, pas au point de faire le pied de grue devant la Fnac ou mon PC pour choper une place de concert (à 50 euros de surcroît), chose qui me rebute plus que de coutume, mais quand l’occasion s’est d’elle-même présentée à moi quelques jours plus tard je n’ai pas hésité.
J’étais donc au théatre antique de Fourvière hier pour la deuxième date (ils étaient à Hyde Park vendredi dernier) de la tournée de reformation des anglais. Date unique en France – nul doute que l’amour inconditionnel que Damon Albarn porte à ce lieu depuis sa première venue a quelque chose à y voir, ceci étant son troisième passage en trois ans aux nuits de Fourvière (précédemment avec The Good, The Bad and The Queen puis avec son label Honest Jons l’année dernière). Public plutôt éclectique mais majoritairement composé de trentenaires, si l’on excepte la tribune des abonnés & entreprises, ainsi que quelques britiches qu’on entend çà et là, venus accompagner leur groupe phare au cours de cette tournée. Pas de première partie, ni d’échauffement, on est tout de suite dans le vif du sujet. Ca attaque très fort, après un titre d’entrée vite balancé (ça c’est fait) c’est donc « Girls & Boys » qui fait lever les quelques spectateurs qui avaient réussi à rester assis jusque là. On est partis pour deux heures, et ça balance les titres les plus connus évidemment (« Beetlebum », « Parklife », « Country House ») au milieu de chansons plus obscures, entre pop ultra efficace des débuts, morceaux rock’n roll époque album éponyme (Graham Coxon enchaîne les galipettes arrière, et Albarn est littéralement euphorique, on croirait voir des gamins hyperactifs, et les voir se donner comme çà fait grand plaisir). Quelques titres plus matures, puisant dans les influences jazzy, et blues du quatuor (splendide version de « Tender », sans doute mon morceau préféré du groupe – absolument magique). Le chanteur (41 ans, rien à dire – le rock ça conserve) joue avec les premiers rangs et se jette dans la foule à deux reprises, avant de se faire attraper le pied par deux ou trois molosses qui ont visiblement comme consigne de ne surtout pas le laisser à la merci de son redoutable et sanguinaire public. On sait bien qu’ils font leur boulot bêtement et sans poser de questions, les molosses, mais merde, c’est quand même un peu choquant cette attitude de berger allemand alors que tout se déroule dans une ambiance super bon-enfant. C’est comme ce gentil emploi-jeune visiblement sous-alimenté (que j’ai malgré tout eu envie – Dieu me pardonne – de traiter d’ignoble abruti, alors qu’il fait simplement son boulot avec un peu trop de zèle) qui vient cordialement demander à l’amie qui m’accompagne d’arrêter de filmer avec son téléphone portable, sans quoi « il se verrait obligé de le lui confisquer ». Non mais c’est vrai, on sait jamais, hein, les retombées dramatiques des fois qu’une vidéo pourrie de Blur en live apparaisse malencontreusement sur Youtube. C’est ça finalement qui est énervant dans ces « gros » concerts, tout serait génial si les responsables de l’organisation, de la production, des pseudo-droits de représentation ou de je-ne-sais-quoi ne se sentaient pas obligés de nous forcer, nous aussi, à nous carrer l’énorme balai qu’ils ont dans le cul. Sûrement l’effet d’être assis juste à coté de la tribune VIP hein, j’espère que dans la fosse au moins ils s’amusent sans se poser ce genre de questions.
Le coup de gueule passé, ne retenons pas ce mauvais épisode, parce que c’est le rappel qui arrive, et bien sûr « Song 2 » (que tout le monde attendait depuis le début pour balancer son petit coussin – on ne touche pas aux traditions) arrive avec ses « woo hoo » qu’on peut tous reprendre en coeur (génial, même les moins anglophiles d’entre nous). Albarn asperge les premiers rangs de flotte, sympa de sa part parce qu’il doit faire chaud là-bas au milieu. Puis le groupe quitte la scène, avant de revenir pour un deuxième rappel de trois titres, le sourire aux lèvres, trébuchant entre les coussins qui continuent de pleuvoir et qui ont recouvert le sol, et deux ou trois emplois-jeunes (toujours eux) qui tentent de les ramasser avec un acharnement professionnel qui force quand même le respect (y compris celui de Damon Albarn visiblement).
Au final donc, deux heures d’un concert vraiment sympathique qui n’a pas manqué de nous rappeler nos soirées étudiantes, et qui nous fait sourire en nous disant que si la musique de Blur n’a pas pris une ride – peut-être bien que nous non plus en fin de compte? C’est beau la force de la musique. Allez c’est décidé, je fais un emprunt à la banque et je vais voir Depeche Mode en novembre.
PS: J’ai utilisé cette photo de l’AFP sans autorisation, je vous remercie donc de bien vouloir signer la pétition pour me sortir de prison si jamais ils me tombent dessus.
cultive ici son addiction à la musique (dans un spectre assez vaste allant de la noise au post-hardcore, en passant par l’ambient, la cold-wave, l’indie pop et les musiques expérimentales et improvisées) ainsi qu’au web et aux nouvelles technologies, également intéressé par le cinéma et la photographie (on ne peut pas tout faire). Guitariste & shoegazer à ses heures perdues (ou ce qu’il en reste).
Lionel
…Mais que fait la sécurité?
Lionel
…je précise quand même que j’ai rien contre les emplois jeunes hein, me jetez pas la pierre
Nico
emplois jeunes!! tu délires, c’est pire, c’est des bénévoles! :-))
Lionel
Les pauvres :lol:
Haz
bénévole ça ne veut pas dire ‘qui veut le bien’ en latin ?
stéphanie J.
je contacterai reporter sans frontière au cas où… promis ! :-)