On a découvert Belong sur le tard, à l’écoute d’October Language, sorti en 2006 sur un label obscur (carpark records). Le travail effectué sur la texture des guitares, présenté par le duo de New Orleans (composé de Turk Dietrich et Michael Jones – non, pas celui-là, l’autre) laissait entrevoir des contours sonores intéressants – alors même que la génèse de l’album avait eu lieu dans la chambre de Dietrich, trompant l’auditeur sans laisser transparaître le visage lo-fi auquel on aurait alors pu s’attendre. Common Era, second LP du groupe désormais signé chez Kranky, perpétue la tradition shoegaze d’October Language – en le revêtant d’un habit post-punk plutôt plaisant.
Les premières secondes de « Come See » arrivent comme un flash, remplies de larsens et de reverb qui évoqueraient presque A Place To Bury Strangers – mais rapidement, ce sont des sonorités plus aériennes qui reprennent le dessus, dès l’entrée des voix, elles aussi noyées dans une épaisse brume nourrie par les claviers et les guitares. Même la boite à rythme de « Never Came Close » subit ce traitement infligé aux mélodies sous-marines, et se met à rebondir dans nos boîtes crâniennes. On se retrouve en terrain vaguement connu, parce que Belong joue autant la carte de la nostalgie – quelque part entre Slowdive et Joy Division, de par les rythmiques dont il s’est paré et ses basses clinquantes (le superbe « A Walk ») – que celle de la recherche d’une nuance qui lui serait propre dans l’élaboration de ce sulfureux mélange. Et le groupe n’est pas loin d’y parvenir – pas loin, car faire du neuf avec du vieux n’est pas un exercice facile – mais il peine du coup à garder la tension qu’il recherche, sur la durée. « Perfect Life », tube post-cold-wave en puissance, idéalement placé – fait tout de même pencher la balance en faveur des Louisianais, qui façonnent leurs ambiances de la plus belle façon, jouant à merveille sur cette mélancolie qui sait dissimuler son évidence, disposant atmosphères planantes et mélodies glaciales.
Les réminiscences ambiant d’October Language se font sentir dans quelques titres (« Keep Still »), mais Belong arbore sur l’ensemble du disque un visage un peu moins expérimental et surprenant, réduisant le format de ses titres bien souvent en dessous des quatre minutes trente, et leur adjoignant désormais des rythmiques tranchées à la serpe. Cette mue, somme toute subtile, reste une belle évolution (même si ce n’est pas forcément celle à laquelle on s’attendait) et Common Era se pare d’un charme évident, qui ne pourra que séduire les amateurs de shoegaze et autres délices dream-pop que nous sommes. Savoir si cet album gardera une place de choix en haut de nos piles de disques – c’est une autre histoire, dont la fin est – elle aussi – dans la brume.
En écoute: « Perfect Life »
[audio:https://darkglobe.free.fr/extraits/110331a.mp3]cultive ici son addiction à la musique (dans un spectre assez vaste allant de la noise au post-hardcore, en passant par l’ambient, la cold-wave, l’indie pop et les musiques expérimentales et improvisées) ainsi qu’au web et aux nouvelles technologies, également intéressé par le cinéma et la photographie (on ne peut pas tout faire). Guitariste & shoegazer à ses heures perdues (ou ce qu’il en reste).