Est-il besoin de présenter Antoine Masy-Perier, alias Tony Truant, tant l’homme est une figure du rock hexagonal – « du rock tout court » ou « global », dirait-il – qui bondit en 1981 sur la scène Rouennaise et demeure encore aujourd’hui actif et pertinent?
L’ex Dogs (de 81 à 92), actuel Wampas (depuis 2005 , avec un premier compagnonnage antérieur à cette date), est un guitariste (global ?) au dessus de tout soupçon, ainsi qu’un auteur/compositeur singulier et attachant ( repris par Sanseverino « La campagne »), aux collaborations pointues et distinguées .
Sous son explosif et détonnant pseudo il démarre ,encore cabot, sa carrière en solitaire.
D’électron libre remarqué par les fans du gang de Rouen, il passe alors à personnalité artistique remarquable. Antoine (qui ne sait pas bien qui est son public, dit-il) accroche, c’est certain, tout bon auditeur de musique rythmée et d’ironie touche française teintée Lautner-Audiard /Oulipo, entendre par ces dernières références littéraire, l’écho d’une écriture cocasse, haute en couleurs et mâtinée d’absurde.
Pour l’enregistrement de son premier LP référencé Robert Dalban Your room is ready sir! (1990) , classieux et en français dans le texte, nonobstant la flingueuse et anglaise citation-titre, Dogs, pas chiens, vinrent lui prêter main forte sous l’étiquette double clin d’œil du Million Bolivar Quartet.
Depuis, émancipé de toute tutelle, notre Antoine Truant (avec t et pas d) qui n’ignore pas les problèmes du monde et y apporte « ses Solutions » (son groupe d’accompagnement actuel, variable selon les latitudes), vole de ses propres ailes. Mais sa vélocité avérée ne lui permet pas d’échapper à tout, et ainsi sait -il, sous ses airs distraits, garder un oeil (qui sait, inquiet?) sur un mystérieux « Corbeau noir » qui pourrait bien parfois planer au dessus de lui. Il lui réglera un jour son compte avec sa mitraillette, tout en déplorant, observateur et critique, que certains qui le devraient ne savent même pas où ça se passe… Aux aguets et affûté, donc, Antoine le héros.
Travailleur aussi, puisqu’il a publié six albums solos dont un sur son propre label (Poussinet) et une compile On the Rocks. Pour L’œil Américain (2009) – excès de modestie et inversement – il met en couverture son seul visage avec couvre-chef mais sans son patronyme: Tony est un Prince .
On ajoute un opus quatre titres et collector avec les amis Fleshtones, chantres du rock garage US/NYC. Enregistré à New York en 2006 de fort tonitruante façon, Allo Brooklyn Ici Montmartre a mené les américains au pas de charge et contraint le culte quatuor à la pratique du français pour un Dick Riversien « Maman n’aime pas ma musique ». Tony saute l’océan et s’exporte, mais il pose ses conditions. Yes sir! D’accord Tony, d’accord.
En 2011 sort « Mélange » à la pochette dessinée par DenisSire, sans doute son meilleur album avec « Ovomaltine, Benzedrine et vengeance » 2003. Titres notables sur ces deux perles : « Je peux aider » adapté de Billy Swan, « Ma femme croit que tu es morte », « Une dose de cheval », entre autres. Rajoutons sans crainte « Qu’ils explosent tous », « Je me régale » (L’œil Américain).
L’ancien diablotin de DOGS est aussi le fondateur du Ukulélé club de Paris. Virtuose du pittoresque instrument (album Mounia) il y compose des titres dont « Le taxidermiste » (1989), succès et clip décalés ,sortis en pleine vague rock alternatif français, sous la tutelle de François Hadji-Lazaro ( Pigalle). Mais notre homme possède surtout – on s’en doutait – de très nombreuses six cordes qu’on l’a souvent vu manier manche en avant – à l’instar d’un Wilko Johnson? – et, bien qu’il les aime toutes, sa Gretsch Round-up 1955 serait, dit-il, sans doute sa préférée. Une affaire de style pour celui qui songe à refaire quelques sessions en Louisiane pour y peaufiner sa pratique du blues des marais aux côtés de CC Adcock.
Bref, l’incarnation d’une certaine idée du rock – pour ne pas dire d’ une idée certaine, voire certifiée ( dotée de trop de classe pour le voisinage ? ) c’est bien lui , Tony Truant: Alphonse Allais à la guitare électrique.
Rencontre en images animées (forcément) et printanière, sur les pentes du Mont Saint Clair à Sète, ville de Paul Valéry, Brassens et des Di Rosa-Combas, qu’il préfère désormais à Paris (« Y’en avait marre ») depuis plusieurs années déjà.
Nous l’avons rejoint pour Dark Globe dans son quartier du Plateau, gloire locale conviviale mais gloire tout de même. Plus d’une heure d’entretien sous le soleil méridional, avec un homme aussi attachant que concerné par cette affaire sérieuse qu’est le rock and roll, et dont on retrouvera ici l’essentiel des propos, au surlendemain de journées en studio, d’une scène parisienne ouverte pour Miossec et avant des dates avec les Wampas (nouvel album)
vidéos par Jack Moulin pour Dark Globe.fr / interview Jean Noël Bouet- Damiani.
Peintre et guitariste, adepte de Telecaster Custom et d’amplis Fender. Né en 1962 – avant l’invention du monde virtuel – pense que la critique musicale peut-être un genre littéraire, objet idéal pour un débat en fauteuil club millésimé.
Pierre
Très bon article.
L’excellent album du Ukulélé Club de Paris s’intitule Manuia ( à ta santé ! en tahitien) et non Mounia.
jean noel bouet
Heureux que tu aies apprécié , Pierre, cette rencontre.Interview. Tony est incontournable !
Petite confusion, inversion orthographique pour Manuia, en effet. Merci de la précision.
Frenchy but Chic! Et un rock nouveau s’éveilla – Dark Globe
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