Ils nous l’avaient expliqué dans leur interview mais nous avions tout de même eu un peu de mal à les croire : dans leur propre pays, la Norvège, Flunk, c’est que dalle, peau de zob.
Nous sommes donc allés voir par nous-mêmes et nous pouvons désormais vous le confirmer. Tout est vrai. Là-bas, Flunk n’existe pas. Les albums sont introuvables chez les disquaires qui respirent encore et nos potes pourtant locaux nous regardent avec de grands yeux ronds et incrédules lorsque nous évoquons le nom de ce groupe de Oslo. On aura beau nous expliquer que « nul n’est prophète dans son pays », on imagine qu’il aura fallu pas mal de volonté à Flunk pour entamer sa onzième année d’existence et sortir un sixième album au nom évocateur de Lost Causes.
Avec un tel titre, il peut sembler étrange d’entendre la galette débuter avec ce qui est sans doute le morceau le plus revendicatif du répertoire du groupe: « Queen of the Underground », dont on vous avait déjà écrit tout le bien qu’on en pensait ; chanson de fin du monde, glacée en surface comme une nuit d’hiver scandinave, passion bouillonnante à l’intérieur, prête à exploser. A peine le temps de se demander si ce morceau précède une déclaration de guerre que l’on se laisse surprendre par « Sanctuary », douce déclaration d’amour et naturelle à la naïveté lumineuse. On retrouve avec plaisir la mélancolie de la voix de Anja Øyen Vister dérivant encore et toujours entre sensualité et innocence comme sur l’étrangement sexy et facétieux « Bummed », (« I said Yes I am impressed but I am still dressed« ), juste assez aérienne sur « Primer », hantée sur le superbe titre éponyme de l’album, toutes en connivences et confidences sur la mélodie en délicatesses de « As If You Didn’t Already Know » pour conclure. Tout en s’intégrant à l’équation Lost Causes, seul « Awkward » et le morceau d’ouverture sèment un trouble bienvenu sur un disque homogène offrant une séduisante, élégante et irrésistible sérénité sur laquelle fond même la voix tremblante au parfum alcoolisé de Ulf Nygaard sur « Subway (J’aime la Pluie d’été) ».
Il y a indéniablement dans cet album une atmosphère d’abandon mais elle tient singulièrement plus à une calme forme de libération. Et là où les deux précédents albums avaient tendance à enfoncer lentement mais sûrement le groupe dans une atonie brumeuse à la fois hypnotique et agréable mais aussi hébétée, propice à une atmosphère morose et une homogénéisation stylistique de leur electro acoustique downtempo, Lost Causes, tout en conservant l’identité sonore du groupe, rassemble avec calme et douceur les forces en présence pour révéler un univers plus apaisé, réconcilié avec ses propres torpeurs, se suffisant à lui-même, laissant glisser au coeur des compositions un début de sourire, une nonchalance gracieuse, un filet d’optimisme mesuré mais bien réel, à la lumière opaque. Quelque part entre chien et loup.
Grand consommateur de Baby Carottes et de sorbets au yuzu, j’assume fièrement mon ultra dépendance au doux-amer, à l’électropop bancale et chétive, aux musiciens petits bras ainsi qu’aux formes épurées du grand Steve Ditko. A part cela? Il y avait péno sur Nilmar.
Interview – Flunk
[…] vous expliquiez que vous aviez enregistré en studio pour Lost Causes (5ème album du groupe et chroniqué ici, NDLA) mais que cette expérience ne vous avait pas vraiment satisfait? Pour quelles […]