Le nom de Brian McBride n’évoquera sans doute pas grand chose à ceux qui ne sont pas familiers avec la musique ambiante, et pour qui Stars Of The Lid n’est qu’un projet obscur de plus, dont l’intérêt n’a d’autre que l’étrange sonorité de son patronyme. Le premier n’est autre que la moitié du duo qu’est le deuxième. Ce nouveau LP, The Effective Disconnect, est à l’origine la bande son composée spécialement par McBride pour le documentaire The Vanishing of the Bees, réalisé par George Langworthy et Maryam Henein, sur l’extinction progressive des abeilles causée par l’utilisation croissante de pesticides dans l’agriculture moderne.
SOTL (qu’on avait découvert avec leur dernier double LP, And Their Refinement of the Decline) montre un savoir faire certain dans la concoction de nappes mélodiques longilignes, étirées et contemplatives. On retrouve sur The Effective Disconnect ces parties très harmoniques, montant puis redescendant, faisant varier leur intensité avec douceur – sonorités synthétiques principalement mais aussi cordes (violons). Les deux premiers morceaux (qui en sont en fait un seul, « Mélodrames Télégraphiés » – découpé en deux mouvements) sont construits selon ce schéma autant répétitif que divaguant, sans réelle structure apparente. Ce n’est qu’un peu plus loin, sur « Several Tries », que des motifs plus marqués font leur apparition, pianos discrets, toujours ralentis et appesantis – soulignant sans doute le caractère dramatique du thème principal du film, sans en pervertir le coté contemplatif qui reste le principal propos ici. « Toil », lui aussi scindé (en trois parties) se laisse aller à quelques dissonances subtiles, s’allongeant passablement jusqu’au presque superflu.
La pièce la plus intéressante du disque se profile alors: « Beekeepers Vs Warfare Chemicals » joue sur l’écart des tonalités, usant de carillons amoindris par un mixage économe, ponctuant la progression du titre de façon presque involontaire. C’est sur la seconde partie du morceau où Mc Bride parvient sans que l’on ne comprenne comment à magnifier l’impact émotionnel de sa musique sans avoir recours à aucun subterfuge, crescendo ou accélération – mais simplement par le placement des silences, par les notes de piano qui viennent libérer le thème de son apathie trompeuse. « I know That You Don’t Like The Future Like I Do » se fond alors dans son sillage, toujours étiré, parcimonieux.
Avec The Effective Disconnect McBride met en oeuvre la méthode Stars Of The Lid d’une façon nouvelle, ramenant la lenteur et le minimalisme à une certaine forme d’extrême légèreté – certainement pour donner forme à son travail autour des visuels du film. Pour autant, jamais les ambiances ne se font pesantes ou ennuyeuses, pour qui est un peu sensible à ce genre de sonorités ; pour les autres cela demandera peut-être un petit effort. Mais voilà quoiqu’il en soit un travail d’une grande finesse qui amène une pierre de choix à l’édifice qu’est le documentaire The Vanishing of the Bees – qui n’a, à ma connaissance, pas encore été projeté dans le coin. A surveiller de près.
En écoute: « Beekeeers Vs Warfare Chemicals »
[audio:https://darkglobe.free.fr/extraits/brianmcbride-beekeepersvswarfarechemicals.mp3]cultive ici son addiction à la musique (dans un spectre assez vaste allant de la noise au post-hardcore, en passant par l’ambient, la cold-wave, l’indie pop et les musiques expérimentales et improvisées) ainsi qu’au web et aux nouvelles technologies, également intéressé par le cinéma et la photographie (on ne peut pas tout faire). Guitariste & shoegazer à ses heures perdues (ou ce qu’il en reste).