Karaoké Moon , c’est le nouvel opus de Warhaus, le projet solo de Marteen Devoldere, co-leader du groupe belge Balthazar. Un 4ème album aux sonorités vintage après We Fucked A Flame Into Being en 2016, Warhaus en 2017 et Ha Ha Heartbreak en 2022.
J’ai découvert le phénomène Balthazar en 2012, à la sortie de leur 2ème album Rats . C’était une époque florissante dans l’émergence de groupes belges, dignes héritiers des pionniers des années 80, dans le sillon creusé par le TC Matic du regretté Arno avec son rock européen en allant jusqu’à la new wave de Polyphonic Size. La signature de la pop belge s’est ensuite affirmée avec Hooverphonic, le dEUS de Tom Barman, Dead Man Ray emmené par Daan, les projets Mud Flow, Puggy, Sharko et bien d’autres… Et puis en 2010 vint Applause, le premier album du phénomène Balthazar, groupe constitué depuis 2004 entre copains de lycée.
Karaoké Moon s’inscrit dans le prolongement de ses prédécesseurs… et pourtant il est très différent. Après les peines de cœur de Ha Ha Heartbreak, album de rupture amoureuse, retour à l’optimisme. Toujours une utilisation anachronique des cuivres, mais cette fois-ci une exploitation plus poussée des chœurs et des cordes. Auteur-compositeur-interprète, Marteen a un côté déjanté, punk et totalement décalé. Un extra-terrestre hyper doué avec un petit grain de folie très présent. Pour mieux l’appréhender, je vous conseille de visionner sur internet le documentaire de 2016 I’m not him, témoignage sur le processus bohème d’écriture du premier album de cet artiste talentueux et hors norme, qui évoque souvent dans ses références l’héritage de Gainsbourg et des romantiques. « Dandy, un peu maudit », sur scène la gestuelle nonchalante et la présence de Marteen évoquent les paradis perdus de Christophe : une élégance féline, un côté bad boy charmeur et un charisme qui capture la lumière.
L’album s’ouvre sur « Where the names are real », une ode à son amour de jeunesse Emely, pleine de beauté et de mélancolie. Un titre illustré par un clip en clin d’œil à la scène finale du Nostalghia d’Andreï Tarkovsky. La quête de la flamme de l’amour éternel.
Toujours très minimalistes, les clips de Warhaus sont emplis de dérision et empreints de la nonchalance de Marteen. Ce que l’on peut vérifier sur “No Surprise”, second clip officiel de l’album. Un titre où l’on retrouve la magie des voix mêlées de Marteen et de Sylvie Kreusch, son ex-compagne. Magnifique duo !
Avec sa voix de crooner qui traîne et son phrasé entêtant, Marteen égrène ses émotions au fil des titres, de la passion intense au désespoir amoureux plus profond encore… Une pop dansante… mais bien plus délurée qu’il n’y paraît, avec des mélodies addictives qui ne sont pas toujours si évidentes.
Dans les titres forts de l’album, je retiens « What goes up », avec son beat électro pop de boîte de nuit écorché par une guitare suggestive. Ou encore « Hands of a clock », une intro à la Nick Cave et des cordes qui voltigent. Dans « Jim Morrisson », Marteen nous rappelle qu’il a passé l’âge du chanteur des Doors. On est bien content que le rocker flamand ait résisté à l’appel du vide ! Un morceau incroyable de près de 7 minutes, habité par un piano rebelle, enlevé par des chœurs groovy puis déstructuré à coups de cuivres et de guitare enflammée. Un titre superbement inspiré ! L’album se termine sur une belle ballade aux accents très Léonard Cohen, guitare et voix sépulcrale, « Emily », retour de l’être aimée évoquée dans la première chanson de l’album.
La boucle est bouclée, plus qu’à y retourner sans modération !!
Warhaus, c’est l’incarnation de cette pop belge de grande maturité, à l’image de l’excellent Daan dont j’aurai sans doute l’occasion de reparler par ici… En tout cas, Karaoké Moon , est un nouvel album au titre improbable, mais un bien bel album de plus pour le Warhaus de l’élégant Marteen Devoldere.
Album CD 10 titres sorti le 22/11/2024. Ecouter l’album sur Spotify
J’ai grandi à l’aire des dauphines, jeune scélérat sans roi. Adolescent, une voix à la radio m’a soufflé « Je fume pour oublier… » et a éveillé ma curiosité musicale jusqu’à l’envie. Balayés le disco et ses paillettes, le noir était de mise et resterait ma livrée. Toujours pas dynamité d’aqueduc, à peine dressé quelques loulous… J’aime la musique qui ose et les voix qui en imposent. Et que ne durent…