Après une première vie sur la scène marseillaise entre 2010 et 2014, Dead Jane s’est exilé loin de Phocée. Les musiciens fondateurs ont quitté le sud pour renaitre en terre bretonne, quatre ans plus tard, entre Quimper et Concarneau, dans un bout de Finistère sur lequel la pluie est plus présente que le soleil méditerranéen…
Il me sera difficile de juger si le ton et les intentions du groupe blues-rock se sont trouvés impactés par sa nouvelle localisation ? Bien que je ne sois pas loin de penser que Dead Jane est sans doute plus à l’aise sur des terres plus septentrionales que celles où il fit sonner ses premiers accords. Un territoire aux ciels changeants, sous lesquels la musique rock se vit et s’écoute comme une sorte de religion, une messe jouée dans des salles à estrades et zincs luisants est probablement celui qui convient pour le rock d’un quartet qui semble croire en la rédemption par les riffs électriques…
Les six titres de Dead Jane premier EP éponyme, relèvent d’une forme d’écriture rock narrative et rugueuse «à la française». On songe à Jacques Higelin rockeur(moins poétique) ou Hubert Félix Thiéfaine (en moins réaliste) qui auraient rencontré Black Sabbath! Dead Jane semble puiser des influences dans un paysage rock-hard-prog qu’on a connu plus présent qu’aujourd’hui dans les années 1970 hexagonales. Soit un style en recherche d’une sophistication et d’une précision évidentes, basé sur une tradition blues très éloignée de toute couleur ou valeur pop, comme du moindre écho new wave ou post-punk. La musique de Dead Jane, davantage rythmique que mélodique, parait de fait obscure, empreinte d’ésotérisme – on pense à Ange, la dimension folk bucolique en moins.
Le chant de Max – auteur – est lyrique par son propos romantique s’il ne l’est pas dans ses formes vocales, la voix étant rarement poussée haut. Le groupe n’a nul besoin de cet effet, qui serait d’ailleurs un inutile effort. Dead Jane se plaît dans une imagerie gothique (« Malfortune ») et païenne (« Sorcières »). Le lexique est typique qui pourrait gagner en épure, la syntaxe des phrases semblant quelquefois trop longue, générant une continuité du texte sur les séquences qui relègue la musique des instruments à un rôle d’accompagnement. Cette perte de complémentarité et contraste sinon de musicalité, je le suppose, n’était pas forcément souhaitée au préalable.
Dead Jane se sortent de ce piège relatif avec « La Traversée des Plaines » qui propose un
traitement moins identique et plus surprenant du chant, avec un final en voix parlée jouant
d’un timbre différent. Poussée plus loin l’idée qui a présidé à cet arrangement pourrait sans
doute apporter de la diversité et du relief au propos esthétique d’un groupe non dénué de
qualités musicales (« La Poussière et la Terre ») le démontrant, et qui devra faire encore
quelques choix.
Peintre et guitariste, adepte de Telecaster Custom et d’amplis Fender. Né en 1962 – avant l’invention du monde virtuel – pense que la critique musicale peut-être un genre littéraire, objet idéal pour un débat en fauteuil club millésimé.