Maudite nostalgie. Pour la deuxième soirée de leur festival, les kids organisateurs du Paris Popfest ont eu l’inestimable et potentiellement désarmante idée pour nos petits coeurs sclérosés d’inviter non pas les Field Mice mais 50% du groupe originel. Bobby Wratten et Michael Hiscock ont créé la formation en 1987 et celle-ci sera devenu, durant 4 trop courtes années, le groupe phare du légendaire label Sarah Records, responsable trop secret de certaines des plus belles et évidentes mélodies indie-pop de l’époque. Michael Hiscock, le bassiste de l’époque, qui vit en France, a finalement accepté de sortir de sa retraite pour reprendre quelques titres du répertoire en compagnie d’amis musiciens. Sans remettre en question la valeur, le talent des autres invités (Catenary Wires, le nouveau groupe de la non moins légendaire Amelia Fletcher, Mehdi Zannad accompagné des Dorian Pimpernel et les excellents Spearmints) du festival et encore moins la qualité de leur set, le caractère absolument exceptionnel de la prestation de Michael Hiscock & Friends (une première a eu lieu au Limoges Popfest il y a deux ans et depuis plus rien) et l’attente du public vis-à-vis de celle-ci aura tout de même eu tendance à les éclipser ce soir-là.
Première constatation: si, à l’exception d’une vidéo de leur dernier concert sur Youtube, on n’a jamais vu les Field Mice sur scène, on imagine un rendu autrement plus chaotique que celui bien carré et propre, proposé par les musiciens de ce samedi. Mais un tel choix ne remet en rien en question cette sensation de bonheur renouvelé éprouvé tout le long du set.
Car malgré les années passées et Hiscock comme unique membre d’origine sur scène, l’ensemble des musiciens a su préserver l’authenticité et le cachet si particulier de cette musique en organisant ces quelques détails, ces canards boiteux qui font sens pour les fans. Ainsi, ce soir, comme au début des Field Mice, il n’y a pas de batteur sur scène; les boites à rythmes plaquent une rythmique martiale, sans fioritures. Hiscock fait de son mieux au micro pour chanter le plus juste possible et on se surprend à rapprocher son timbre de voix de celui-ci de son ancien collègue de jeu, Bobby Wratten. De cette époque et malgré le plaisir évident d’être sur scène, le bassiste conserve aussi cette attitude d’anti rock-star, ce côté tout à fait humble, trop honnête pour prétendre, heureux mais sans doute aussi un peu embarrassé de voir des spectateurs à la fin du concert lui tomber dans les bras pour le remercier. On l’imagine plutôt comme ce type juste conscient d‘avoir participé à l’écriture de quelques chansons pour un succès tout à fait confidentiel. Pourtant, celles-ci auront marqué assez de personnes pour traverser plus de deux décennies et s’incarner dans l’esprit de ses auditeurs comme les représentants d’une mélancolie adolescente immaculée, enfouie peu à peu sous les années qui passent. Ainsi devant Hiscock, dans la fosse, la grande majorité du public connait les paroles des chansons par coeur et des larmes coulent dès les premières notes d’ «Emma’s House» ou «If You Need Someone». Ce samedi soir, la limpidité cristalline des compositions du groupe est retrouvée et les textes, si élégamment littéraux, brillent encore d’une innocence adolescente magnifiée (toujours aussi déchirante « So Said Kay »). Gavin Priest, (chanteur, compositeur des Proctors et programmateur des parties de batterie pour le concert) rejoindra le groupe sur scène pour s’acquitter des tâches vocales sur un «This Love is Not Wrong» bien péchu puis les accompagnera à la guitare jusqu’à la fin du concert.
A la fin, chacun parmi le public a le même réflexe et regarde sa montre. Le set a duré moins de 45 minutes avec en conclusion, le très espéré «Sensitive» joué à trois guitares. Pas de rappel bien entendu. Tout cela paraît douloureusement bien trop court. Alors, sitôt terminé, certains se permettront probablement de rêver à des apparitions plus fréquentes, en province et un set rallongé. Malheureusement, il paraît compliqué de spéculer sur l’état d’esprit de Michael Hiscock à ce sujet. Est-ce que lui-même se sent totalement légitime de s’investir plus dans un tel projet sans Bobby Wratten ou une telle perspective pourrait-elle même l’intéresser? Difficile de le savoir surtout lorsque le bonhomme affirme depuis bien longtemps être passé à autre chose. Il y a sans doute ici un équilibre à la fois artistique et bien plus largement personnel que lui seul peut vraiment appréhender. Et il faut l’admettre: malgré toute la débordante affection portée au répertoire des Field Mice, cette discrétion et cette rareté conviennent particulièrement bien à l’histoire du groupe et à sa dignité. Alors quoiqu’il puisse arriver dans le futur, la prestation de ce soir aura finalement suffi au bonheur des fans présents: les sourires béats se portaient sans pudeur dans la salle, supportés, parmi un chaos de douces émotions, par un joli sentiment de gratitude; celui d’avoir assisté à un instant particulier et rare, et entendu à nouveau ces chansons trop fluettes, fragiles et sincères pour un monde comme le nôtre.
Grand consommateur de Baby Carottes et de sorbets au yuzu, j’assume fièrement mon ultra dépendance au doux-amer, à l’électropop bancale et chétive, aux musiciens petits bras ainsi qu’aux formes épurées du grand Steve Ditko. A part cela? Il y avait péno sur Nilmar.
Jean Noel Bouet
Ç quoi Le baby carotte, En fait ?
John-Ive Penven
Pour avoir assisté à quelques concerts de Field Mice, je confirme le côté bancal sur scène. Néanmoins, il y avait qq chose de particulier à ces concerts, tu étais sûr d’entendre de nouveaux morceaux à chaque fois. Mary détestait chanter sur scène et quand même il y avait la batterie de Mark.