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Disques

Piano Magic / Closure

 

Glen Johnson a donc choisi le vingtième anniversaire de son projet Piano Magic pour en écrire le dernier chapitre. Un projet polymorphe et à géométrie variable, dont la formule aura été pendant longtemps plutôt minimaliste – Johnson lui-même se chargeant des compositions et laissant d’innombrables invités (on citera en vrac Vashti Bunyan, Alan Sparhawk, John Grant ou encore Brendan Perry) venir apposer leur chant sur des vagues de sons électroniques ou des guitares feutrées. Pourtant, depuis l’album Disaffected (2005), Johnson s’était entouré d’un lineup stabilisé autour de Franck Alba (chant), Jérome Tcherneyan (batterie) et Alasdair Steer (basse) et avait depuis offert quelques excellents disques, dont on retiendra principalement Ovations (2009). L’annonce faite il y a quelques mois, par Glen Johnson lui-même, de la sortie d’un ultime album avait de quoi surprendre, Piano Magic n’ayant jamais, nous semble t’il, manqué d’inspiration.

Il ne pouvait être de meilleur choix pour le titre de ce disque : « Closure », ce mot qui suggère l’idée de « tourner la page ». Mais davantage que ce sentiment de détachement et de libération, c’est de sa quête dont il est ici plutôt question, et les plaies dont les chansons se font l’écho semblent loin d’être cicatrisées. Le refrain du titre éponyme nous l’affirme juste avant de se laisser partir dans une longue instru : « No, you never get closure ». Et les ambiances des morceaux suivants planent elles aussi sur ces histoires rongées par le regret, situations éprouvantes auxquelles le narrateur s’est trouvé confronté, avec la séparation comme ligne directrice : « Landline », dont la première phrase jette un clin d’oeil discret et amusant au « Hotline Bling » de Drake (Glen Johnson n’a pas l’air comme ça mais il a un sens aiguisé de l’humour), « You Never Stop Loving (The Ones That You Love) » qui ébranle élégamment l’idée sous-entendue par le titre de l’album. Cette notion de passé inhérent au présent est sans aucun doute l’un des thèmes de prédilection de Johnson : le morceau « No Closure » (extrait de l’album Artist’s Rifle paru en 2000 – comment ne pas le citer ici !) en est un témoin référent. Baigné d’une douce amertume, Closure revisite vingt ans d’une discographie fascinante : des réminiscences indie-rock de Disaffected (« Let Me Introduce You ») à l’électronica fluette, teintée de cold wave, de Troubled Sleep (« Exile »), chaque titre rend singulièrement hommage au classicisme épuré des albums antérieurs (écouter les violons et l’orchestration sublime de « Living For Other People » et son final en spoken word, géniale réincarnation de « No Closure » dont on parlait un peu plus haut).

Le groupe nous offre un de ses plus beaux featurings puisqu’on retrouve le chant unique de Peter Milton Walsh (The Apartments) sur le bouleversant « Pay Attention To Your Life », habité par le savoir-faire tout « british » du songwriter et du chanteur qui l’accompagne : évoluant sur un fil aérien, tendu entre émotion contenue et mélancolie fiévreuse.

« I Left You Twice Not Once », enfin, sème le doute en signant cette elliptique lettre d’adieu, de son couplet semblant vouloir enfoncer le dernier clou du cercueil mais nous laissant le mince espoir d’un retour, plus tard, plus loin, sous une autre forme, ou sous un autre nom. « I could not bear to say goodbye », chante Glen Johnson. Qu’il se rassure : voir Piano Magic rejoindre la liste des groupes appartenant au passé est tout aussi difficile pour nous.

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