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Disques

Yumi Zouma / Yoncalla

Yumi Zouma YoncallaCela fait déjà pas mal de temps que, personnes de petite vertu, nous avions succombé sans grande résistance au coefficient imparable et démesuré de coolitude des hipsters néo-zélandais de Yumi Zouma. Tandis que nous avions cru comprendre que le plan de carrière anémié (et en conséquence enthousiasmant) des quatre kiwis s’imaginait incompatible avec la conception même d’un album (voir notre critique de leur précédent EP), la parution de Yoncalla a révélé que notre remarque était aussi erronée qu’une prédiction boiteuse de Paco Rabanne. Malgré cette méprise de notre part, loin de nous l’envie de snober cette jolie galette aux dix morceaux plus légers que l’éther et à la séduction aussi tranquille qu’un koala mâchouillant sa feuille d’eucalyptus.

Si la méthode de composition du disque a été différente (les néo-zélandais étaient cette fois réunis dans la même pièce pour l’écriture de l’album et non plus éparpillés aux quatre coins du globe), cela n’a pas semblé entraîner une révolution dans l’esthétique sonore du groupe: même sans l’apport magnétique des deux renversants singles pops et mattes qu’étaient « The Brae » et « Catastrophe », les tonalités et l’atmosphère de Yoncalla restent dans la droite lignée des deux précédents EP. Avec un talent certain, le groupe s’acharne à mettre en avant le charme discret de l’éphémère, jouant avec une facilité insidieuse et la perversité maligne des jeunes gens doués qui se fichent d’avoir quelque chose à prouver. Car de par ici, la musique se révèle toute imprégnée de la désinvolture, du syndrome jalousée des mains dans les poches, d’une aisance à caresser du bout des doigts et dans une série de frissons tièdes une sensualité tranquille et naturelle aux beats matelassés (« Barricade (Matter of fact) »).

Sur Yoncalla, les reflets des boules à facette disco vintage dans l’objectif de la caméra se souviennent dans un écho très lointain d’années soixante-dix fantasmées, qui auraient avec bonheur oubliées les chemises col pelle à tarte et les pantalons pattes d’eph (« Text from Sweden » et la funk très pâle, presque translucide, de « Yesterday ») pour uniquement conserver une légèreté dansante et calmement mélancolique; une langueur incarnée par la voix sinueuse de Christie Simpson, toute en fragilité et continuellement en rase-mottes sur les lignes de rupture. Elle joue ainsi parfaitement l’exercice de l’équilibre précaire avec les guitares de « Haji Awali », l’electro pop entraînante de « Keep It Close to Me » ou les gentils et enveloppants coups de boutoirs synthétiques de « Short Truth ». La recette du groupe se renouvelle tout au long de l’album avec une aisance froide pour distribuer en série des rayons de lumières mattes en forme de nid d’abeille chatoyants de sensibilité et d’élégance, comme autant d’humbles plaisirs sautillants.

Coquettement hédoniste, Yoncalla ressemble effectivement à la bande son d’un été paisible, d’instantanés Polaroïd qui emballent le palpitant et les petons. Pourtant, il porte aussi en lui, avec sa mélancolie crampon et sa discrétion vaporeuse, la tragédie amère des bonheurs qui s’achèvent inéluctablement et des jeunesses qui ne s’éterniseront jamais.

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