S’il y avait un groupe que l’on n’attendait plus vraiment, c’est (aussi) celui-ci: deux excellents albums (Side Effects et Superheroes Crash ) d’electropop sortis en 2004 et 2006 (rendez-vous compte, ma brave dame, à cette époque, Jacques Chirac était encore Président de la République) et puis plus rien: des cartes postales sans réponse, des coups de fil qui finissent directement sur le répondeur, des avis de recherche qui moisissent au fil des mois sur les poteaux électriques sur lesquels on les avait collés. A peine avait-on entr’aperçu en 2011 (!), l’annonce d’un nouvel disque intitulé Bright Side qui sortira… quatre ans plus tard. Il aura donc finalement fallu neuf ans à Virginie Krupa et Alexandre Brovelli pour reprendre le cours de l’histoire d’OMR. Au-delà du sincère plaisir de savoir que le duo allait finalement se réveiller d’une léthargie presque équivalente à celle d’Hibernatus, on ne pouvait que s’interroger sur ce que cette absence avait changé entre eux et nous.
Et étonnement, il suffit d’entendre « I.L.L.U.S.I.O.N.S » ou « Fear That’s It! » pour disperser nos craintes et retrouver ces caractéristiques que l’on croyait abandonnées depuis presque une décennie. La voix de Virginie Krupa possède toujours ce caractère étrangement adolescent; tout à la fois arrogant, froid et frondeur. S’inscrivant comme la marque de fabrique du groupe depuis Superheroes Crash, la nervosité respire encore constamment sous les deux compositions, à la fois par l’intermédiaire d’une rythmique martiale et précise ou dans les riffs secs et agressifs des guitares vindicatives.
Mais si Superheroes Crash avait privilégié une approche plus rock, l’électronique se retrouve ici à nouveau au centre du jeu sonore du groupe. Tandis que « Don’t » emprunte les autoroutes d’une synthpop plutôt classique, les sonorités synthétiques proposent de nouvelles perspectives au restant de l’album. Tout en s’épanouissant dans des structures pop, elles creusent des circonvolutions alambiquées, préférant les dédales cérébraux comme sur « Orange Neon Lights » ou le single « The Joy in The Headphone ». Sur celui-ci, l’apparence d’un bordel electropunk cache difficilement le soin apporté à la progression et la richesse de la cohabitation stylistique d’un morceau faussement WTF. Revitalisée et renouvelée, l’electronica du groupe s’autorise un regard en arrière teinté de mélancolie (l’instrumental « Ocean and the Lands Behind »), contamine d’un onirisme sonore une folk toute en tendresse charnelle (« Out of Breath and Naked ») ou velvetienne (la très belle et naïve conclusion du disque « Tambourine ») avec une jolie délicatesse.
Sans être un album véritablement lumineux ou particulièrement apaisé malgré son titre, « Bright Side » esquisse une toile sans doute plus contrastée que les travaux précédents du duo. Tandis que la mélancolie chez OMR avait autrefois tendance à majoritairement prendre plaisir à broyer du noir dans une approche nihiliste mais constamment pop et très souvent émouvante, « Bright Side » continue la construction de l’identité OMR en élevant ses fondations pour capter des rayons de lumière plus ou moins intenses. L’album étire le champ stylistique et thématique du groupe sans le forcer ni le rompre mais en conservant ses fondamentaux musicaux dont un évident savoir-faire mélodique. Cette timide évolution aura pris tout de même neuf ans pour se révéler au monde. La route pour y arriver aura donc été aussi longue que notre attente mais, aujourd’hui, nous sommes juste heureux de les revoir en aussi belle condition; des discrètes traces de bronzage singulièrement dispersées le long du corps.
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Grand consommateur de Baby Carottes et de sorbets au yuzu, j’assume fièrement mon ultra dépendance au doux-amer, à l’électropop bancale et chétive, aux musiciens petits bras ainsi qu’aux formes épurées du grand Steve Ditko. A part cela? Il y avait péno sur Nilmar.